Points de langue

Le blog de moncorrecteur.net

En plus de la correction professionnelle de tous vos textes, je propose quelques astuces avec ce blog pour répondre aux questions que vous vous posez sur la langue française.

 

 

 

1 2 3 4 5

Travailler son style littéraire avec un correcteur professionnel

29/09/2024

Travailler son style littéraire avec un correcteur professionnel

Dans mon dernier article (disponible en cliquant ici), je vous montrais la valeur ajoutée de la correction approfondie professionnelle par rapport à une simple relecture, et je mentionnais notamment le travail optionnel sur le style du texte. Aujourd’hui, je reviens un peu plus en détail sur cette notion de style pour vous permettre de comprendre l’intérêt spécifique de cette prestation complémentaire et ce que le manuscrit y gagne au final.

 

Sommaire

Qu’est-ce que le style ?

En quoi consiste mon travail sur le style en tant que correcteur ?

À qui s’adresse l’option style ?

En résumé, les avantages et inconvénients du travail sur le style réalisé par un correcteur professionnel indépendant.

Combien coûte l’option style ?

Référence

 

 


1. Qu’est-ce que le style ?
Le mot propose une ribambelle de définitions qui s’étendent depuis des outils antiques jusqu’à nos façons d’être. Celle qui nous intéresse aujourd’hui concerne bien évidemment l’écriture, et les définitions du Robert me semblent pertinentes :

« 1. Part de l’expression (notamment écrite) qui est laissée à la liberté de chacun, n’est pas directement imposée par les normes, les règles de l’usage, de la langue » et : « 2. Manière d’écrire présentant des qualités artistiques. »


Ces définitions nous éclairent déjà sur la raison qui me pousse à proposer cette prestation de travail sur le style en option uniquement, sans l’inclure dans la correction approfondie de base : la liberté à l’extérieur des normes de la langue et le côté artistique sont par essence subjectifs, propres à chacun. Le style dépend de ce que l’auteur ou l’autrice veut véhiculer (comme émotions, comme message, etc.) et de quelle manière. C’est en quelque sorte sa « patte », sa signature caractéristique.


On reconnaît par exemple du Tolkien grâce à la richesse du vocabulaire employé, à ses descriptions saisissantes, à la complexité de ses phrases qui confèrent une musique au texte ou encore au côté épique (et cela peut varier, voyez les différences entre le Hobbit et le Silmarillion : le style dépend aussi de qui va lire le texte). On reconnaît du Terry Pratchett pour la fluidité ininterrompue de ses récits, l’absence de chapitres, les jeux de mots, la drôlerie intelligente de l’humour et les emplois typographiques peu conventionnels. Tous ces éléments sont à l’extérieur des règles et relèvent de choix de ces auteurs. C’est leur style.

 

 

 

2. En quoi consiste mon travail sur le style en tant que correcteur ?
C’est une prestation complémentaire de la correction approfondie (je dois déjà corriger le texte pour pouvoir le retravailler, tout comme on ne construit pas une maison sur de mauvaises fondations) qui vise à comprendre les qualités et les défauts d’un texte afin de proposer de nombreuses suggestions de modification en marge du document. 


Si je parle de qualités et de défauts, c’est-à-dire d’éléments concrets, quantifiables et plus ou moins objectifs alors que je viens de montrer que le style est par essence quelque chose de subjectif, ce n’est pas par hasard. Mon travail avec cette option sur un manuscrit en tant que correcteur professionnel va être de réfléchir à ce qui est constitutif du style et ce qui relève de la faiblesse. Par exemple, on peut considérer qu’un paragraphe de quatre lignes qui comprend cinq adverbes qui se terminent par -ment est assez « lourd ». Cela peut être une faiblesse si l’auteur ou l’autrice n’a pas réfléchi à la question et que c’est un accident, ou alors partie intégrante du style si c’est pour montrer quelque chose (par exemple le caractère d’un personnage si l’on est dans une réplique). À moi de démêler ce qui est volontaire de ce qui ne l’est pas, et de trouver le moyen d’aider à améliorer ce qui peut l’être !

 


A. Ce que je vérifie
Je m’imprègne donc du texte et je repère ce qui est voulu et ce qui est accidentel en me basant sur des éléments vérifiables, parmi lesquels (mais pas exclusivement) :


– Les répétitions. Est-ce que ce mot répété cinq fois en trois lignes montre un manque de variété du vocabulaire ou à l’inverse sert la narration d’une façon ou d’une autre ? Est-ce que c’est choquant à la lecture, ou gênant, ou au contraire est-ce que ça sonne bien ?
Les verbes ternes. Ce sont les verbes que l’on utilise automatiquement, sans y penser, alors qu’un verbe moins courant, plus riche et précis serait plus adapté. Là encore, s’ils ne sont pas réfléchis pour montrer quelque chose ou pour une question de rythme, ils peuvent constituer une faiblesse d’écriture. Je pense aux verbes avoir, faire, aller, mettre
– Dans la même lignée, on retrouve le vocabulaire peu précis. Cela arrive quand l’auteur ou l’autrice ne connaît pas forcément en profondeur un domaine sur lequel il ou elle écrit, et c’est parfaitement normal. Par exemple, parler du « Klaxon » d’un bateau alors qu’il serait peut-être plus pertinent d’écrire « corne de brume ». À l’inverse, vous pouvez constater par exemple chez Jaworski (Janua Vera ; Gagner la guerre, etc.) à quel point le vocabulaire est riche et précis et comment cela profite au texte et rend crédible un univers pourtant de fiction.
– Les lourdeurs. J’ai déjà cité l’emploi abusif d’adverbes qui viennent alourdir un texte, mais on retrouve dans cette catégorie la syntaxe, avec des phrases qui peuvent être laborieuses. Comme toujours, la question est de savoir si cela est volontaire et constitutif de ce qui est raconté ou pas : je travaille alors sur la fluidité du texte. J’ajoute aussi les tournures impersonnelles ou passives, dont je questionne la pertinence et la fréquence (les « il s’agit », « il faut », « il a été décidé », etc.) ou encore les connecteurs logiques trop scolaires pour des textes littéraires (« en effet », « par conséquent », etc.).

 

 

B. Une démarche de proposition et collaborative
J’attache une grande importance au respect du texte que je corrige, c’est pourquoi je n’applique bien évidemment pas directement au document les modifications que je pense pertinentes pour améliorer les points cités plus haut. Je propose des reformulations par le biais de suggestions que j’écris en marge du document avec l’outil de commentaires de Word. C’est ensuite l’auteur ou l’autrice qui décide d’intégrer ou non les propositions d’amélioration du style à son manuscrit au cas par cas, ce qui permet de garder la main tout en entrant dans une démarche d’échanges constructifs. Même des recommandations qui ne sont pas retenues au final peuvent enrichir un texte grâce à la réflexion qu’elles ont engendrée !


Concrètement, l’auteur ou l’autrice reçoit le manuscrit avec mes corrections, et les mots ou phrases que je suggère de revoir apparaissent surlignés avec un commentaire qui explique pourquoi et comment je propose de retravailler le passage. Ce n’est pas une réécriture, donc il ne s’agit pas de reprendre chaque phrase et de les reformuler, mais plutôt de se concentrer sur des points précis, en fonction du style de chacun. C’est donc une prestation très personnalisée que je tente d’adapter aux différents besoins, et qui par essence reste aussi subjective : mes recommandations reflètent mes propres expériences.

 

 

C. Trois exemples
– Premier exemple avec une phrase qui présente une faiblesse ponctuelle :

 

« Par cette nuit de pleine lune, elle file au gré du vent qui siffle à ses oreilles. Perdue dans ses pensées, les cheveux au vent, elle progresse. »


Dans ce cas, je surligne « au vent » (une répétition qui me paraît involontaire) et je formule un commentaire qui ressemble à cela :

 

« Répétition. Suggestion : “… les cheveux virevoltant dans son sillage, elle progresse.” »

 

Ainsi, l’auteur ou l’autrice pour décider d’intégrer ma proposition ou non. Vous seriez surpris de voir à quel point on a tous et toutes tendance à créer des répétitions dans nos textes, même aboutis, et c’est valable aussi pour les écrivains confirmés !

 

 

– Voici une autre phrase avec une faiblesse ponctuelle :


« La créature se terrait. Il faisait froid et elle avait faim, mais ne perdait pas espoir. Bientôt, elle trouverait de quoi subsister. »


Avec cet exemple, je surligne « Il faisait froid et elle avait faim » (la tournure est impersonnelle et les verbes employés sont ternes et gagneraient selon moi à être enrichis). J’écris donc le commentaire suivant :

 

« Impersonnel et terne. Suggestion : “La créature se terrait. Elle ne perdait pas espoir malgré la faim et le froid qui la tenaillaient…” »


Ici, j’ai reformulé pour enrichir le vocabulaire et la tournure, tout en respectant la structure choisie à l’origine avec trois phrases plutôt brèves, car ce n’est pas parce qu’on travaille le style qu’on doit le modifier en profondeur. Il s’agit d’aider à améliorer un style personnel existant, et, là encore, l’auteur ou l’autrice garde la main et décide d’intégrer ou non la proposition.

 

 

– Enfin, une phrase au style très pauvre (c’est rare de combiner autant d’éléments pour une même phrase, mais c’est pour illustrer mon propos que j’exagère un peu ici) :


« Il a faim, donc il met son chapeau de cuisinier, va à la cuisine et fait à manger pour combler sa faim. Il marche vers l’homme devant lui. Ce dernier a les cheveux noirs et lui fait un signe de tête. »


Dans ce cas, je propose une reformulation complète si je pense que l’intégralité de la phrase est à revoir, par exemple  :

 

« Lourdeur et terne, à reformuler. Suggestion : “Un gargouillis d’estomac, et le voilà qui enfile sa toque, direction la cuisine pour préparer le dîner. Elle est occupée par un homme aux cheveux noirs, qui lui adresse un signe de tête.” »


Le texte d’origine reste inchangé, mais la proposition apparaît en marge du document et c’est à nouveau l’auteur ou l’autrice qui choisit de modifier sa phrase (ou non).

 

 

Ce qu’il faut retenir avec ces exemples, c’est qu’en tant que correcteur, je mets en évidence les éléments qui peuvent constituer une faiblesse pour aider l’auteur ou l’autrice à travailler sur son texte, et j’accompagne systématiquement mes remarques de suggestions prêtes à l’emploi.

 

 

 

3. À qui s’adresse l’option style ?
Vous vous en doutez, tout le monde ne ressent pas le besoin d’un travail sur le style, pour différentes raisons. Certains ne veulent pas que leur premier jet soit trop éloigné du résultat final, on peut considérer que leur style est celui qu’ils obtiennent dès qu’ils écrivent, qu’il se construit naturellement au fur et à mesure. D’autres ne souhaitent pas que leur texte soit modifié et désirent que leur style reflète leur vision propre, avec ses qualités et ses défauts. Toutes les démarches sont valables et peuvent se justifier si on les réfléchit.


Pour autant, ce travail sur le style est pertinent pour tous et toutes, car il introduit une réflexion et un échange qui seront forcément bénéfiques au texte. Pour les autrices ou auteurs débutants, cela peut aider à mettre le doigt sur des faiblesses ou à s’exercer à réfléchir sur son manuscrit, et les discussions sont un bon moyen de l’enrichir. Pour les personnes plus confirmées (qui ont déjà publié plusieurs fois, par exemple), cela permet de comprendre des tics involontaires à reconsidérer ou de travailler sur un sujet qu’on ne maîtrise pas du bout des doigts, tout en entraînant cette même réflexion vertueuse utile à chaque manuscrit.

 

 

 

4. En résumé
Le style est la manière typique et personnelle que chacun a d’écrire un manuscrit donné, sans lien avec les règles d’orthographe, de grammaire ou de typographie. C’est donc une caractéristique subjective d’un texte, qui dépend de nos sensibilités, de nos préférences et de nos expériences de lecture. Cependant, on peut identifier des éléments quantifiables sur lesquels réfléchir pour enrichir un manuscrit, à travers le traitement des répétitions, des verbes ternes, du vocabulaire pauvre et des lourdeurs, entre autres : déterminer si ces éléments sont employés volontairement et de quelle manière permet alors de créer des propositions personnalisées pour améliorer le texte.

 

Les avantages du travail sur le style réalisé par un correcteur professionnel indépendant

– Cela permet de disposer d’un regard extérieur sur son texte qui s’étend au-delà des simples règles d’orthographe, de grammaire et de typographie.
– Cela entraîne un échange dans une démarche commune d’enrichissement du texte. Les propositions génèrent de la réflexion et mettent le doigt sur des axes d’amélioration.
– Cela permet de disposer de propositions concrètes et utilisables tout de suite  afin d’éliminer efficacement les faiblesses identifiées du texte. Si les propositions que je formule vous conviennent, vous pouvez facilement les intégrer à votre texte.

 

Les inconvénients du travail sur le style réalisé par un correcteur professionnel indépendant

– C’est une option qui prend du temps. Je considère que le travail sur un manuscrit me prendra deux fois plus de temps si je me penche sur le style que si je me concentre sur la seule correction approfondie. Cela demande aussi du temps de passer en revue les nombreux commentaires que je formule et décider de les intégrer ou non.
– Qui dit plus de temps de travail dit une prestation plus coûteuse.
– C’est une prestation qui traite d’éléments subjectifs, propres à la sensibilité de chacun.

 

 

 

5. Combien coûte l’option style ?
Mon tarif de base pour l’option style en complément d’une correction approfondie est de 0,90 € les 1000 signes avec espaces, et peut légèrement varier au cas par cas.


Cela signifie que si votre manuscrit est de 430 000 signes, votre tarif sera de 430*2,4 = 1 032 €.

(Le « 2,4 » est composé de 1,50 € de correction approfondie, mon tarif moyen, et de 0,90 € d’option style.)

 

Dans tous les cas, mes tarifs de correcteur indépendant sont établis après échange avec vous et adaptés à chaque manuscrit. Vous pouvez consulter toutes mes prestations à partir de ce lien, et me contacter depuis cette page.

 

 

 

Référence
Le Robert, en ligne, consulté le 26 septembre 2024 à l’adresse https://dictionnaire.lerobert.com/definition/style

La correction approfondie et professionnelle de manuscrits

08/02/2024

La correction approfondie et professionnelle de manuscrits

Sommaire


Relecture ou correction approfondie ?


Les raffinements qui font la correction approfondie


Exemple d’application d’une correction approfondie


En résumé, les avantages et inconvénients de la correction approfondie réalisée par un correcteur indépendant

Combien coûte une correction approfondie ?
Références

 

(Note : la plateforme qui héberge ce site ne permet pas de gérer les différents types d’espaces. En fonction de votre appareil et de votre navigateur, il se peut que vous constatiez des incohérences sur les espaces, surtout sur smartphone. Sur un logiciel de traitement de texte, ces éventuelles imperfections, comme un point d’interrogation en début de ligne, ne peuvent pas apparaître si le travail sur les espaces a été correctement réalisé, ce qui est le cas dans une correction approfondie.)

 

 

1. Relecture ou correction approfondie ?
Je distingue d’abord la correction, ou correction approfondie, souvent désignée par les maisons d’édition comme préparation de copie, d’une relecture. 


Pour ce que l’on nomme relecture sur épreuves, il s’agit de relire (re-lecture, vous l’avez ?) un texte qui a déjà été corrigé (par une ou un professionnel) et mis en pages, afin d’en ôter les coquilles et de vérifier que le travail graphique n’a pas introduit d’erreur (en assurant par exemple le foliotage, la numération des pages). 


Pour la correction approfondie, le correcteur ou la correctrice doit préparer le manuscrit pour l’éditeur, pour qu’il soit quasi définitif en vue de sa mise en pages (préparation de copie, emphase sur le premier terme). On pourrait distinguer préparation de copie et correction, mais en pratique, en tout cas dans ma pratique de correcteur indépendant, c’est une prestation globale. Cela inclut bien entendu la vérification de l’orthographe, des conjugaisons et accords des participes, de la syntaxe, des coquilles et doublons involontaires, et j’en passe. 


Mais proposer un français irréprochable selon certains standards ne permet pas d’assurer le côté professionnel de son manuscrit. Qu’est-ce qui fait qu’un livre, ou plutôt son texte, tel qu’on le lit une fois acheté à la librairie, ressemble à ce qu’il est ? Qu’il est agréable, facile à parcourir, clair ? Qu’aucune ambiguïté ou difficulté ne vient s’interposer entre l’auteur ou l’autrice et la personne qui va découvrir l’ouvrage ? Pour répondre à ces interrogations, il faut mobiliser tout un tas de petites choses que le lecteur ou la lectrice ne percevra même pas : et ça tombe bien, car le but de ces raffinements est non seulement de rester aussi discrets que possible, mais également de fluidifier l’expérience de lecture. Cela représente un travail considérable, très chronophage et quasi invisible à la fin pour le profane.

 

 

2. Les raffinements qui font la correction approfondie
Une fois, alors que je soumettais un devis de correction à un auteur en herbe, celui-ci, en voyant que je comptais le nombre de caractères avec les espaces pour établir mon tarif, m’a simplement répondu sur un ton péremptoire : « Mais, monsieur, les espaces, ça ne se corrige pas ! » Première nouvelle. Rien n’est plus faux, et cela fait justement partie de tous ces détails qui font qu’un texte est professionnel. Sur ce point, je vous renvoie à mon article de blog que vous retrouverez en cliquant ici, si vous souhaitez en savoir plus sur les différents types d’espaces et leurs usages.

 


A. La typographie 

Ce travail considérable, ce raffinement dont je parle est d’une part représenté par la typographie. Typographe, c’est un métier à part entière, c’est une discipline indispensable à tout texte destiné à être lu. C’est un peu comme le saucier des grandes cuisines. C’est grâce à l’orthotypographie que le texte est lisible, que les mots ne se chevauchent pas n’importe comment, qu’ils sont coupés proprement à chaque retour à la ligne, qu’une lettre en italique ne vient pas empiéter sur l’appel de note qui suit, que les dialogues sont aisément compréhensibles par tous sans même avoir besoin d’y penser. 

 

Des tirets et des répliques bien alignés ? Merci la typographie !

Les points d’interrogation ne peuvent se glisser en début de ligne ? Merci la typographie !

L’emploi cohérent de l’italique permet d’immédiatement identifier ici un titre, là un hôtel ? Encore merci la typographie !

 

L’orthotypographie, c’est, je dirais, prendre soin des caractères invisibles du texte et de tout ce qui peut sembler anecdotique afin de soigner sa composition, de l’emploi des majuscules à la ponctuation. C’est un point d’autant plus crucial à l’heure des livres numériques et des liseuses, car la mise en page dynamique générée par l’appareil qui affiche le texte ne fait pas de cadeau à celles et ceux qui oublient l’orthotypographie, avec des mots tronqués, des espaces sans cohérence, une présentation illisible de dialogues, etc. 

Avec la correction approfondie, c’est la ou le correcteur qui insère les données directement dans le document, ce qui facilite son exportation dans différents formats.


Pour celles et ceux que ça intéresse, je conseille l’excellent dictionnaire raisonné de Jean-Pierre Lacroux, Orthotypographie, sous licence libre. 

 

 

B. Le travail de fond
D’autre part, la ou le correcteur en préparation de copie réalise une grande quantité de vérifications de cohérence, de fond. C’est à ce stade que l’on signale qu’un personnage parlait en argot au chapitre 2, et qu’il emploie maintenant au chapitre 4 un langage soutenu alors que ce n’est jamais justifié dans le manuscrit. C’est à ce stade que l’on signale que l’inspecteur Bidule n’appuie pas sur la gâchette, mais bien sur la détente de son pistolet pour faire feu. C’est à ce stade que l’on signale que madame de Machin, dans le cadre d’un roman historique, n’a pas pu s’entretenir avec Louis XIV en 1723, ce dernier étant mort en 1715. Qu’un personnage décrit comme roux est évoqué par sa belle chevelure blonde un peu plus tard. 

 

Vous avez l’idée.

 

La correction approfondie, c’est un accompagnement à tous les niveaux, y compris le fond, c’est une aide à l’auteur ou l’autrice, à qui l’on propose des modifications qui semblent pertinentes.

J’insiste sur le côté proposition : la personne chargée de la correction n’a pas, selon moi, à intervenir directement pour changer le fond d’un texte, mais fait remarquer les incohérences. C’est à l’auteur ou à l’autrice de décider ensuite quoi faire, et il est parfaitement possible d’opter pour quelques incohérences volontaires !

 

 

C. Le travail sur le style
Enfin, dans le cadre d’une correction approfondie, on peut également choisir de retravailler le style du texte, en éliminant les lourdeurs, les répétitions, les verbes ternes ; en reformulant certains passages et réécrivant certaines phrases. Cette démarche est, encore une fois, de l’ordre de la proposition, l’autrice ou l’auteur reste seul maître de son texte. Il s’agit d’une prestation que je propose en option, non incluse dans celle de base, car vous pouvez ne pas en ressentir le besoin ou ne pas souhaiter que le texte soit modifié. 

 

 

3. Exemple d’application d’une correction approfondie

 

A. Document de travail, avant et après correction
Voici un extrait de manuscrit à corriger. Imaginons qu’Arthur Conan Doyle ait eu l’idée de faire appel à mes services pour la version française d’Une étude en rouge (j’ai ajouté les erreurs moi-même…) :

 

« Docteur Watson, Mr Sherlock Holmes dit Stamford en nous présentant l’un à l’autre.
— Comment allez-vous ?” dit-il cordialement
Il me serra la main avec une vigueur dont je ne l’aurai pas cru capable.
« Vous avez été en afghanistan, à ce que je vois !
— Comment diable le savez-vous ? » demandai-je avec étonnement.
– Ah çà !... »
Il rit en lui-même.
« La question du jour, reprit-il, c’est l’hémogmobine ! Vous comprenez sans doute l’importance de ma découverte ?
— Au point de vue chimique, oui, répondis-je mais au point de vue pratique…
-Mais, cher monsieur, c’est la découverte médico-légale la plus utile qu’on ait faite
depuis des années ! Ne voyez-vous pas qu’elle nous permettra de déceler infailliblement les tâches de sang

? Venez par ici !
Dans son ardeur, il me prend par la manche et m’entraîne vers sa table de travail.
« Prenons un peu de sang frais, dit-il. (il planta dans son doigt un long poinçon et recueillit au moyen d’une pipette le sang de la piqûre) Maintenant j’ajoute cette petite quantité de sang à 1 litre d’eau. Le mélange qui en résulte, a, comme vous voyiez, l’apparence de l’eau pure. La proportion du sang ne dois pas être de plus d’un millionième. Je ne doute pas cependant d’obtenir la réaction caractéristique. »
Tout en parlant, il jeta quelques cristaux blancs ; puis il versa quelques gouttes d’un liquide incolore. Aussitôt le composé prit une teinte d’acajou sombre
; en même temps, une poussière brunâtre se déposa.

 

 

Voici le texte avec l’ensemble des corrections appliquées mises en valeur en rouge.

 

« Docteur Watson, M. Sherlock Holmes, dit Stamford en nous présentant l’un à l’autre.
— Comment allez-vous ? » dit-il cordialement.
Il me serra la main avec une vigueur dont je ne l’aurais pas cru capable.
« Vous avez été en Afghanistan, à ce que je vois !
— Comment diable le savez-vous ? demandai-je avec étonnement.
Ah çà !... »
Il rit en lui-même.
« La question du jour, reprit-il, c’est l’hémoglobine ! Vous comprenez sans doute l’importance de ma découverte ?
— Au point de vue chimique, oui, répondis-je, mais au point de vue pratique…
 Mais, cher monsieur, c’est la découverte médico-légale la plus utile qu’on ait faite depuis des années ! Ne voyez-vous pas qu’elle nous permettra de déceler infailliblement les taches de sang ? Venez par ici ! »
Dans son ardeur, il me prit par la manche et m’entraîna vers sa table de travail.
« Prenons un peu de sang frais, dit-il. (Il planta dans son doigt un long poinçon et recueillit au moyen d’une pipette le sang de la piqûre.) Maintenant, j’ajoute cette petite quantité de sang à un litre d’eau. Le mélange qui en résulte a, comme vous voyez, l’apparence de l’eau pure. La proportion du sang ne doit pas être de plus d’un millionième. Je ne doute pas cependant d’obtenir la réaction caractéristique. »
Tout en parlant, il jeta quelques cristaux blancs ; puis il versa quelques gouttes d’un liquide incolore. Aussitôt le composé prit une teinte d’acajou sombre ; en même temps, une poussière brunâtre se déposa.

 

 

B. Détails des corrections

Pour corriger ce texte, je vérifie dans un premier temps l’orthotypographie.

– Je m’assure que la présentation des dialogues est cohérente. Dans notre exemple, je vois que le tiret cadratin est utilisé pour introduire les répliques, sauf à deux moments : il y a un tiret demi-cadratin et même un trait d’union qui n’est pas suivi d’une espace insécable, ce qui est incohérent et empêche l’alignement des répliques. 

– Je vérifie que les espaces sont du bon type aux bons endroits. Je constate que l’espace qui précède le point d’interrogation de la huitième réplique est justifiante, alors qu’elle devrait être fine, tout comme celle qui précède le point-virgule de la dernière phrase, ce qui a engendré deux retours à la ligne malheureux. 

– Je corrige également l’emploi des guillemets. Je remplace le guillemet anglais perdu par un guillemet français, je supprime le guillemet en trop et ajoute celui qui manque.


Ensuite, j’entre dans le texte. Je m’assure :

– de l’orthographe ;

– de la grammaire ;

– de la ponctuation ;

– de la syntaxe ;

– qu’il ne faudrait pas passer un terme en italique ;

– etc.

Je vous épargne le compte-rendu complet des modifications et des fautes banales, vous pouvez consulter le texte corrigé ci-dessus, mais je reviens sur quelques points importants pour la correction approfondie de notre exemple.

 

Je procède à diverses vérifications et annotations. 

– Je vérifie que les abréviations sont correctes. Dès la première ligne, je constate que l’abréviation utilisée est Mr, à la place de M. en français, je demande donc en commentaire à l’auteur s’il souhaite rester sur ce modèle pour souligner le côté anglais ou s’il veut passer à l’abréviation française. 

– Je vérifie également que le nom Stamford est écrit correctement, en comparant les différentes occurrences dans le manuscrit. Je liste les noms propres pour référence.
– Je prends note que Watson est étonné que Holmes fasse preuve de vigueur lors de la poignée de mains, ce qui nous éclaire sur la description des personnages et pourrait être utile à l’avenir pour vérifier les éventuelles incohérences.


Pour la cohérence et l’harmonisation :

– je me penche sur la phrase « Dans son ardeur, il me prend par la manche et m’entraîne vers sa table de travail », qui est au présent alors que le reste du récit est au passé ;

– je m’assure que l’écriture des nombres est cohérente (en chiffres ou en lettres, et dans quels contextes). Je corrige ainsi le « 1 litre » par « un litre » et je prends note de traiter les nombres à venir de la même façon.

 

 


4. En résumé
Nous venons de le voir et de le mettre en pratique, la correction approfondie d’un manuscrit est bien plus qu’une relecture de surface dont le but serait seulement de nous débarrasser des fautes d’orthographe. Il s’agit de réfléchir à différentes échelles sur un texte, du plus petit élément (l’espace fine insécable, par exemple, invisible et pourtant essentielle) à la plus grande échelle (comment sont décrits les personnages à l’échelle du manuscrit entier). C’est un travail qui exige une forte implication, une concentration de tous les instants et une curiosité indispensable pour réaliser les diverses vérifications. En bref, c’est une tâche chronophage, qui demande de l’expérience et des compétences qui dépassent la simple maîtrise de la langue ; c’est tout un métier.

 

 

Les avantages de la correction approfondie réalisée par un correcteur indépendant
– Elle permet de corriger les fautes d’orthographe, de grammaire, de syntaxe, etc.
– Elle assure la qualité professionnelle de présentation du texte, notamment grâce à l’orthotypographie, et permet à celui-ci d’être prêt pour la mise en pages définitive à venir.
– Elle garantit la cohérence du manuscrit, tant sur le fond (personnages, histoire…) que sur la forme (emploi de l’italique, des chiffres…).
– Elle entraîne une réflexion, un échange entre correcteur et auteur ; et quoi de plus efficace pour améliorer son texte que d’y réfléchir ?

 

 

Les inconvénients de la correction approfondie réalisée par un correcteur indépendant
– C’est une prestation qui prend un certain temps pour être menée correctement.
– C’est une prestation plus coûteuse qu’une simple relecture de surface, en lien direct avec le temps nécessaire pour la réaliser.
– C’est une prestation qui demande une implication et un travail d’intégration de la part de l’auteur ou de l’autrice, qui, suivant ou non les recommandations, choisit de modifier ou de ne pas modifier son texte. C’est donc une démarche active.

 

 

 

5. Combien coûte une correction approfondie ?

Mon tarif de base pour une correction approfondie est, en moyenne pour un texte littéraire, à 1,50 € les 1000 signes avec espaces.

Cela signifie que si votre manuscrit est de 430 000 signes, votre tarif sera de 430*1,5 = 645 €.

Pour ce tarif pour 1000 signes avec espaces, comptez un peu moins de 1,50 € si votre texte est long, et un peu plus s’il est technique. (Plus le texte est long, et plus le tarif unitaire est bas.)


Dans tous les cas, mes tarifs de correcteur indépendant sont établis après échange avec vous. Vous pouvez consulter toutes mes prestations à partir de ce lien, et me contacter à partir de cette page.

 

 

Références

CONAN DOYLE, Arthur, Une étude en rouge, texte libre de droits, 1887.


LACROUX, Jean-Pierre, Orthotypographie, sous licence creative commons que l’on peut consulter sur http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/2.0/fr/, 2007.

Le pluriel de cent et de vingt

10/12/2023

Le pluriel de cent et de vingt

Sommaire
La règle générale pour les adjectifs numéraux cardinaux
Les quelques subtilités à cette règle générale
Les adjectifs numéraux ordinaux
En résumé

Sources

 

 

1. La règle générale pour les adjectifs numéraux cardinaux
Un adjectif numéral cardinal est un chiffre ou un nombre qui exprime une quantité.
On ajoute un « s » final à cent et vingt quand ces derniers sont multipliés et qu’ils terminent l’adjectif numéral cardinal qu’ils composent.

 

 

Combien serez-vous au mariage ? Cent ? Deux cents ? Deux cent quatre-vingts ?

 

Le premier nombre n’est pas multiplié, cent reste au singulier. 
Le deuxième est multiplié par deux, c’est comme s’il y avait non pas un, mais deux cents : on ajoute la marque du pluriel.
Le troisième est plus compliqué : cent est invariable, car il ne termine pas le nombre 280. En revanche, le vingt est multiplié quatre fois pour faire 80, et il termine 280 : on ajoute un « s » final (2 x 100 + 4 x 20).

 

 

2. Les quelques subtilités à cette règle générale
A. Lorsque l’on ajoute cent ou vingt
La règle générale n’est valable que si cent et vingt sont multipliés. Oui, c’est écrit dans la première partie de cet article, mais j’insiste sur ce point qui est plus subtil qu’il n’y paraît. 

 

 

Vous plaisantez ! Nous serons mille cent !

 

Remarquez comment le cent reste au singulier alors qu’il termine bien le nombre 1100.

C’est parce que nous n’avons pas multiplié cent par quelque chose, mais nous avons ajouté cent à mille. La logique est différente.

On n’ajoute pas de « s » final à cent et vingt quand ces derniers sont additionnés à un autre nombre. 

 

 

Cet ordinateur coûte deux mille cent euros, et c’est une affaire ! Hier, il était vendu deux mille cinq cents.

 

Dans cet exemple, on additionne cent à deux mille pour former le premier nombre, 2100 (2 x 1000 + 100), tandis que l’on multiplie cent par cinq avant de l’ajouter pour le second, 2500 (2 x 1000 + 5 x 100).

 


B. Million et milliard
Million et milliard sont des noms, pas des adjectifs numéraux cardinaux. Il faut en tenir compte lorsque l’on cherche où se termine l’adjectif numéral qui nous intéresse, car, je le rappelle, on met la marque du pluriel à cent et à vingt quand ils terminent l’adjectif numéral cardinal qu’ils composent.

 

 

Ce film a rapporté trois cents millions d’euros.

 

Dans cet exemple, on pourrait être tenté de ne pas mettre de « s » à cent, car il est suivi par millions.

Ce serait une erreur.
Millions étant un nom, l’adjectif se termine bien au mot cents, qui prend donc la marque du pluriel.

L’adjectif numéral cardinal 300 qualifie le nom millions.

 


3. Les adjectifs numéraux ordinaux
Les adjectifs numéraux ordinaux expriment un ordre, une place, un classement, un rang, contrairement aux adjectifs numéraux cardinaux dont nous avons parlé jusqu’ici, qui, pour mémoire, indiquent une quantité.

 

Les ordinaux sont repérables assez facilement quand on sait quoi chercher.

 


Je suis arrivé premier, je suis le numéro un ! 

 

Premier et un sont des numéraux ordinaux.

 

Pour les mots cent et vingt, ce sont des adjectifs numéraux ordinaux lorsqu’ils signifient « centième » ou « vingtième ». 

Dans ce cas, cent et vingt ne prennent pas la marque du pluriel.

 


Elle est née dans les années quatre-vingt.


Les années n’expriment pas une quantité de choses : elle est née dans les années qui portent le numéro mille neuf cent quatre-vingt de notre ère.

 

 

Ouvrez vos livres page trois cent.


Il ne s’agit pas d’ouvrir trois cents pages, mais de trouver la trois centième. 

 

Dans ces deux exemples, on ne parle pas d’une quantité, mais d’un ordre : vingt et cent ne prennent pas de « s ».

 


4. En résumé
On greffe un « s » final à cent et à vingt uniquement lorsqu’ils sont multipliés et qu’ils terminent un adjectif numéral cardinal.

Cette règle ne s’applique pas si cent et vingt sont ajoutés plutôt que multipliés ou dans le cas des adjectifs numéraux ordinaux.

 

 

Sources
CLAEREBOUT, M.-F., Optimiser son score au certificat Voltaire, Paris, PUF, 2019.



LAURENT, N., DELAUNAY, B., Bescherelle, la grammaire pour tous, Paris, Hatier, 2019.

ChatGPT, une menace pour les correcteurs professionnels ?

31/08/2023

ChatGPT, une menace pour les correcteurs professionnels ?

J’ai lu ici et là que le métier de correcteur professionnel était menacé par l’intelligence artificielle, tout comme ceux de l’écriture en général ou des artistes. C’est vrai, pourquoi payer quand on peut demander à un robot conversationnel de reprendre nos fautes d’orthographe gratuitement ou à une IA de générer la couverture de notre prochain roman ? Je me suis donc inscrit à ChatGPT pour en avoir le cœur net, et voici mon expérience.


Sommaire

Introduction
Le texte de travail, avec tout un tas de fautes
Analyse de la proposition de correction de ChatGPT
Résumé de l’analyse
Le texte corrigé à la main
Conclusion

 

 

Introduction

Tout d’abord, il faut savoir que je ne prétends pas mener une recherche exhaustive avec des méthodes scientifiques, je laisse cela aux spécialistes. Je retranscris simplement mon opinion telle que je l’ai forgée grâce à mon expérience personnelle, ponctuelle et limitée.

 

ChatGPT est un « agent conversationnel utilisant l’intelligence artificielle […] spécialisé dans le dialogue ». (Source : Wikipédia.) C’est un outil en ligne avec lequel des humains peuvent dialoguer par texte, et qui est capable d’entretenir une conversation, de faire des recherches pour vous, de conseiller quelqu’un, voire d’écrire des articles. (Entre autres.)


Cela étant dit, sachez que j’ai utilisé la version GPT-3.5 pour essayer de corriger un extrait de texte avec la demande : « Peux-tu corriger l’extrait suivant selon les normes orthographiques françaises traditionnelles et les normes typographiques de l’Imprimerie Nationale ? »

 

Mise à jour du 12 juin 2024 : j’ai retenté l’expérience avec la version GTP-4o, et mes conclusions n’ont pas changé. L’outil fait les mêmes erreurs et se permet en plus de modifier davantage le texte, ce qui montre que la tendance n’est pas vers une démarche littéraire et de respect des écrits.

 

 

 

Le texte de travail, avec tout un tas de fautes

 Le texte à corriger comportait 778 caractères avec les espaces, le voici en intégralité.

(Attention, le texte ci-dessous de couleur orange est bourré de fautes ! Cascade à ne pas reproduire chez vous. D’ailleurs, ce qui est écrit est faux, je n’ai aucun talent en peinture, je n’ose imaginer le massacre si je m’attaquais à des figurines.)

 

J’adore peindre des figurines du Seigneur des Anneaux! Quand on regarde ma collection, on s’exclame souvent sur “les heures et les heures qu’ont nécessité ce travail d’orfevre.” Je me suis inspirer des illustrations d’Alan lee pour les couleurs et le travail sur les textures. Par exemple pour les arbres ors et jaunes de Fendeval, trouvés chez cet artiste qui a commencé sa carrière dès 1897. J’aime particulièrement peindre troupes d’aventuriers, comme dans Le Hobbit. C’est une expérience a essayer ! Mais imaginez le boulot sur les détails quand on s’occupe d’une dizaine de petits êtres à la tête desquelles se trouve gandalf, bien plus grand. La fièvre du Seigneur des Anneaux n’est pas prête de retomber, comme à l’époque où on achetait nos badges « Gandalf président ! ». 

 

 

Analyse de la proposition de correction de ChatGPT

Voici l’analyse que je fais de la proposition de l’IA (proposition signalée avec le texte en rouge ci-dessous), phrase par phrase. Sans rien divulgâcher, il reste un paquet d’erreurs. Je précise que l’outil m’a répondu d’un bloc, mais que j’ai scindé ici son texte pour insérer mes commentaires afin de fluidifier la lecture.

 

  

J’adore peindre des figurines du Seigneur des Anneaux !

 

Dans cette première phrase, l’outil a bien repéré qu’il manquait une espace entre le titre et le point d’exclamation, mais il a mis une espace sécable, et non une fine. Je vous invite à consulter cet article pour en apprendre plus sur les espaces, mais sachez qu’avec une espace sécable ici, on risque de se retrouver avec le point d’exclamation en tête de ligne lors de la mise en page finale. De plus, il n’a pas passé le titre en italique. Niveau typographie, la première phrase prouve que le compte n’est pas bon ! Je lui ai donc demandé de revoir la typographie, et il a été capable de passer les titres en italique pour l’extrait entier. J’ai dû ensuite demander explicitement qu’il ajoute les espaces insécables et fines aux bons endroits, ce qu’il est parvenu à faire. Mais quel auteur ou autrice irait itérer ainsi pour obtenir ce résultat ?

 

Continuons l’analyse.

 


Quand on regarde ma collection, on s’exclame souvent sur « les heures et les heures qu’ont nécessité ce travail d’orfèvre ».

 

Dans cette deuxième phrase, ChatGPT a correctement remplacé les guillemets anglais par des guillemets français et ajouté l’accent à orfèvre. De plus, il a repositionné le point à l’extérieur des guillemets, c’est satisfaisant ! Mais il a laissé des erreurs grossières, le verbe n’est pas conjugué à la bonne personne et le participe passé n’est pas bien accordé (il fallait écrire « … les heures qu’a nécessitées ce travail… »).  

 


Je me suis inspiré des illustrations d’Alan Lee pour les couleurs et le travail sur les textures.

 

L’outil a bien corrigé la troisième phrase, assez simple, et ajouté la majuscule au nom propre.

 


Par exemple, pour les arbres d’or et de jaune de Fendeval, trouvés chez cet artiste qui a commencé sa carrière dès 1897.

 

La quatrième phrase est très intéressante, car l’IA prend la liberté de modifier le texte pour éviter le problème d’accord des couleurs. Elle aurait dû écrire « … pour les arbres or et jaune… » (Or reste toujours invariable en tant qu’adjectif de couleur, et, dans ce contexte, jaune aussi, parce que chaque arbre contient de l’or et du jaune dans l’illustration en question.) Fendeval a été passé en italique quand j’ai demandé de revoir la typographie, mais c’est le nom d’un lieu dans les livres, il fallait le laisser en romain. De plus, l’outil n’a pas tiqué sur l’année 1897. Alan Lee est né en 1947, il a commencé sa carrière d’illustrateur dans les années 1970. ChatGPT n’a pas su vérifier la cohérence des informations données.

 


J’aime particulièrement peindre des troupes d’aventuriers, comme dans Le Hobbit. C’est une expérience à essayer !

 

Ces phrases, la cinquième et la sixième, sont bien corrigées (sauf le titre, passé en italique uniquement après ma deuxième demande). L’outil a ajouté le mot manquant et remplacé a par à.

 


Mais imaginez le travail sur les détails quand on s’occupe d’une dizaine de petits êtres à la tête desquels se trouve Gandalf, bien plus grand.

 

Cette septième phrase est également intéressante. L’IA a bien corrigé desquelles pour desquels et elle a ajouté la majuscule au nom propre. Mais elle a remplacé boulot par travail. En clair, elle a pris la liberté de modifier mon niveau de langue alors que je ne lui avais rien demandé. Une erreur impardonnable pour un ou une spécialiste de la correction, car qui la commettrait déposséderait la personne qui écrit de son œuvre. 

 


La fièvre du Seigneur des Anneaux n’est pas prête à retomber, comme à l’époque où on achetait nos badges « Gandalf président ! ».

 

Dans cette dernière phrase, même problème pour le titre qui n’a pas été passé en italique du premier coup. J’aurais également préféré « près de retomber » plutôt que « prête à retomber ». L’outil a, de plus, laissé le point final à l’extérieur du guillemet fermant alors qu’il y a un point d’exclamation à l’intérieur. C’est une séquence qui n’est pas tolérée par les normes de l’Imprimerie Nationale (ce point est sujet à débat, mais étant donné que j’avais donné pour instruction de suivre les recommandations de l’Imprimerie Nationale, force est de constater que le test n’est pas réussi). ChatGPT a pu corriger cela quand j’ai pointé le souci du doigt dans une demande supplémentaire. 

Mais qui irait prendre par la main l’outil afin de l’accompagner pour rectifier chaque omission ?

 


Résumé de l’analyse

J’ai pu tirer un texte presque satisfaisant de ChatGPT, mais seulement après avoir formulé cinq demandes supplémentaires pour corriger des points spécifiques. De plus, malgré mes indications, l’outil n’a pas du tout été en mesure de revoir la deuxième phrase, ni de comprendre l’incohérence sur la date, ni d’enlever l’italique à Fendeval. 

 

ChatGPT sait maintenant gérer les règles typographiques françaises, mais uniquement si on lui en fait la demande et qu’on lui tient la main pour ses erreurs. Mais l’outil est incapable de corriger une phrase complexe (notamment les accords de participes passés dans un contexte où l’auxiliaire avoir est utilisé, ce que j’ai pu vérifier avec d’autres essais), et il ne comprend pas de quoi l’on parle : il ne voit pas les incohérences. 


Enfin, il prend des libertés avec le texte pour éviter les difficultés et pour remplacer certains mots. Ce point est peut-être le plus grave. Aucun correcteur professionnel digne de ce nom ne se permettrait de déposséder l’auteur ou l’autrice de son œuvre : si l’on pense que quelque chose cloche, on écrit un commentaire, on en discute. On échange. Voilà peut-être une tâche dont l’IA n’est pas capable.

 

J’ai également tenté de faire corriger le texte à Bard, l’IA de Google. Le résultat a été catastrophique : l’outil prend encore plus de libertés, n’applique pas les normes typographiques françaises et laisse la plupart des erreurs grossières.

 


Le texte corrigé à la main

Voici la correction manuelle que je propose pour l’extrait. (Veuillez noter que les espaces insécables ne sont pas gérées par le traitement de texte de ce blog, ce qui pourrait générer quelques décalages avec les points d’exclamation et les guillemets en fonction de votre affichage. N’hésitez pas à consulter mon article sur le sujet pour en savoir plus !)

 

J’adore peindre des figurines du Seigneur des Anneaux ! Quand on regarde ma collection, on s’exclame souvent sur « les heures et les heures qu’a nécessitées ce travail d’orfèvre ». Je me suis inspiré des illustrations d’Alan Lee pour les couleurs et le travail sur les textures. Par exemple pour les arbres or et jaune de Fendeval, trouvés chez cet artiste qui a commencé sa carrière dans les années 1970. J’aime particulièrement peindre des troupes d’aventuriers, comme dans Le Hobbit. C’est une expérience à essayer ! Mais imaginez le boulot sur les détails quand on s’occupe d’une dizaine de petits êtres à la tête desquels se trouve Gandalf, bien plus grand. La fièvre du Seigneur des Anneaux n’est pas près de retomber, comme à l’époque où on achetait nos badges « Gandalf président ! »

 

 

Conclusion

ChatGPT est donc un outil qui peut avoir son utilité, mais la question est de savoir pour qui. 

 

Les correcteurs et correctrices corrigent un texte bien plus vite et efficacement que ça, sans avoir à prendre par la main un enfant-IA qui s’excuse et revoit péniblement ses erreurs une à une (en en oubliant un certain nombre, et pas des moindres).

 

Les auteurs et autrices n’ont pas le temps ni forcément les compétences pour vérifier la qualité de la correction, notamment pour la typographie qui est une discipline à part entière. Ils ne pourront pas avoir l’assurance qu’il n’y a pas de fautes, pas d’incohérences, à cause des omissions et libertés prises par l’outil. Enfin, ils n’ont certainement pas envie que leur texte soit modifié de façon arbitraire. Le remplacement du mot boulot par travail est un exemple ridicule de lissage d’une œuvre, qui conduirait immanquablement à une uniformisation des textes en les tirant vers le bas, vers un monde sans saveur, s’il était appliqué à l’ensemble de la production littéraire. 

 

Je suis sûr que vous savez d’ores et déjà reconnaître un article généré par IA, de ceux qui inondent les sites pour susciter du clic. Qui veut des créations fadasses comme celles-là ?

 

Je suis certain que l’IA va continuer ses progrès à la vitesse de l’éclair et qu’elle sera un jour ou l’autre capable de corriger un texte du premier coup. Mais n’oublions pas les biais avec lesquels elle est conçue : ils sont reproduits et amplifiés, ce qui étrangle la créativité. (Et renforce les stéréotypes, ce qui est un autre sujet à part entière.) 

Je doute qu’elle devienne un outil fiable pour la correction professionnelle d’œuvres littéraires. Ce n’est d’ailleurs pas l’usage qui lui est destiné, il y a un tas de domaines pour lesquels l’intelligence artificielle saura se rendre utile. Chez les littéraires, tout au plus servira-t-elle de plume aux « créateurs de contenu » qui cherchent à optimiser leur référencement (jusqu’à ce que ce modèle économique déjà obsolète finisse par s’effondrer).

Les compléments de mesure

07/06/2023

Les compléments de mesure

Je ne regrette pas d’avoir dépensé les sept euros que m’a coûté ce livre.


Voilà une autre règle peu connue, et qui est source d’erreurs à la fois pour les personnes qui écrivent et pour celles qui lisent. Les premières parce qu’elles ont tendance à oublier l’existence de cette règle, les secondes parce qu’elles peuvent pointer une erreur du doigt quand il n’y en a pas !


Aujourd’hui, je reviens sur les règles à appliquer quand on a affaire à un complément de mesure et je vous propose quelques astuces pour les distinguer du complément d’objet direct.

 

 

Sommaire


Les points communs entre le complément d’objet direct et le complément de mesure.
Le complément de mesure n’est pas un complément d’objet direct.
Quelques éléments à garder en tête
.

En résumé

Sources

 

 

1. Les points communs entre le complément d’objet direct et le complément de mesure

Le complément d’objet direct, ou COD, est un complément essentiel du verbe qui se construit directement. 
En clair, il ne peut pas être supprimé ni déplacé sans changer le sens de la phrase, la rendre incomplète ou en détruire la syntaxe, et il ne demande aucune préposition (à l’inverse du complément d’objet indirect).

Vous le connaissez, c’est ce mot qui répond à la question qui ? ou quoi ? et qui est si important pour accorder les participes passés.

 

Elle aime les pâtes.


Ici, les pâtes est COD, on ne peut pas le supprimer ni le déplacer.

 

Le complément de mesure, lui aussi, est un complément essentiel du verbe qui se construit directement.

 

Cette machine à laver pèse soixante kilos.


Ici, soixante kilos est complément de mesure.

 

Difficile de les distinguer, et puis, à quoi bon s’ils sont si semblables ? Eh bien, figurez-vous qu’il y a des raisons de se poser la question si l’on veut éviter les fautes.

 


2. Le complément de mesure n’est pas un complément d’objet direct

Reprenons les exemples précédents en modifiant un peu les phrases.

 

Les pâtes qu’elle a aimées.


Les soixante kilos qu’a pesé la machine à laver.


Remarquez comment aimées s’accorde alors que pesé reste invariable.

Un complément de mesure n’est pas un COD, voilà pourquoi.

La différence fondamentale est que le complément de mesure n’exprime pas la même chose qu’un COD, il répond à la question combien ? ou combien de temps ? 


Elle a aimé quoi ? Les pâtes. 
La machine à laver a pesé combien ? Soixante kilos.


Étant donné que les compléments de mesure ne sont pas des COD, les règles d’accord qui concernent ces derniers ne s’appliquent pas, ce qui explique l’invariabilité du participe passé.

 

Le Bescherelle et les guides d’Antidote donnent l’astuce suivante pour s’y retrouver : il faut essayer de tourner la phrase à la voix passive. Si c’est possible, alors vous avez affaire à un COD, si c’est impossible, c’est un complément de mesure.


Les pâtes ont été aimées par elle. 


La transition est possible, c’est bien un COD.

 

 

*Les soixante kilos ont été pesés par la machine à laver.*


La transition est impossible, il s’agit d’un complément de mesure.

 

Retenez qu'un complément de mesure ne peut pas être le sujet d'une phrase à la voix passive.

 

 

3. Quelques éléments à garder en tête

A) L’expression d’une mesure est une caractéristique essentielle du complément de mesure. (Logique, n’est-ce pas ?)

Le complément de mesure, comme son nom l’indique, mesure quelque chose. Il faut donc réfléchir au sens de la phrase et à ce qu’elle exprime.

S’il s’agit d’une durée, d’un prix, d’une distance, d’un poids… c’est plutôt d’un complément de mesure qu’il s’agit ! 


Le piège est de penser qu’un complément de mesure ne peut exister qu’avec un nombre. Pourtant, la règle est valable qu’il y ait un nombre ou pas.

 

Les cinq bouteilles d’eau que j’ai bues quand il faisait 40 °C me restent sur l’estomac.


Ici, bien qu’il y ait un nombre exprimé, il ne s’agit pas d’une mesure. J’ai bu quoi ? Les cinq bouteilles d’eau. Il s’agit d’un COD (d’ailleurs, vous pouvez passer la phrase à la voix passive), le participe passé de boire s’accorde.

 

 

Les heures que j’ai attendu chez le médecin sont innombrables.


Remarquez que la réponse à combien de temps ? n’est pas explicitement donnée, mais qu’on parle bien d’une durée ici – autrement dit, d’une mesure de temps.

*J’ai attendu quoi ?* Non, ce n’est pas vraiment ce qui est dit, il ne s’agit pas d’attendre les heures. 
On cherche plutôt à montrer à quel point l’attente a été longue, c’est une durée. Ici, vous pouvez remplacer que par « pendant lesquelles », c’est le meilleur moyen de s’assurer que c’est bien une mesure de temps qui est exprimée.
Les heures est complément de mesure et le participe passé du verbe reste invariable, car il n’a pas de COD. On pourrait dire que « j’ai attendu le médecin pendant des heures ».

 

 

B) Le verbe vivre
Le verbe vivre dans le sens de demeurer, ainsi que les autres qui véhiculent la même idée comme séjourner, peuvent exprimer une durée s’ils sont au sens propre ou bien un ressenti, quelque chose de plus abstrait, si l’on prend le sens figuré. Il faut à nouveau se tourner vers l’idée que véhicule la phrase pour trancher, voire connaître les intentions de l’auteur.

 

Les années qu’il a vécu à Rouen, il a beaucoup étudié.


Cette phrase exprime une durée – on peut remplacer qu’ par pendant lesquelles –, c’est bien un complément de mesure. Le participe passé de voir est invariable.

 

 

Les cinq semaines qu’il a vécues furent éprouvantes.


Ici, vivre exprime un ressenti, c’est le sens figuré qui est utilisé. Il a vécu quoi ? Cinq semaines (qui furent éprouvantes). Nous avons bien un COD placé avant le verbe, le participe passé s’accorde.

 

Je tenais à donner ces quelques exemples pour montrer qu’il n’y a pas de solution toute faite et que, comme souvent en français, c’est le sens qui détermine tout.

Prenez le temps de réfléchir à ce qu’expriment les phrases qui posent problème, et vous trouverez comment accorder ces satanés participes passés. 

 

 

4. En résumé

Le complément de mesure est un complément essentiel du verbe qui se construit directement. Il exprime une mesure (poids, durée, distance, prix…) et répond à la question combien ? ou combien de temps ? 


Ce n’est pas un complément d’objet direct, les règles d’accord du participe passé qui y sont relatives ne sont donc pas appliquées.


En cas de doute après avoir répondu à la question combien ? ou combien de temps ?, pour déterminer qu’il s’agit d’un complément de mesure, le mieux est selon moi de se pencher sur le sens de la phrase, ce qu’elle exprime réellement, afin de trancher.

 


Sources

CLAEREBOUT, M.-F., Optimiser son score au certificat Voltaire, Paris, PUF, 2019.


LAURENT, N., DELAUNAY, B., Bescherelle, la grammaire pour tous, Paris, Hatier, 2019.


« Participe passé et faux COD », Guide de grammaire, Antidote 11, version 2.1 [Logiciel], Montréal, Druide informatique, 2022.

Le blog

Sur moncorrecteur.net, en plus de la correction professionnelle de tous vos textes, je propose quelques astuces avec ce blog pour répondre aux questions que vous vous posez sur la langue française.

 

pierre.moncorrecteur@gmail.com

 

07 81 68 77 28

Points de langue